Des nouvelles du projet SHAMA !
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Victor Brun, membre du projet SHAMA, Doctorant au CRIOBE et Sulubaaï Environmental Foundation prend la parole et nous présente leurs avancées !
“Le projet SHAMA (Shark Fin Bay Marine Association) de la Fondation Sulubaai a été lancé en août 2022 dans le but de créer une communauté de chercheurs, pêcheurs, décideurs et membres d’ONG rassemblés par un enjeu commun : la Shark Fin Bay de Palawan, aux Philippines, la durabilité de sa pêche et la sécurité alimentaire de ses habitants. Après une série de réunions avec tous les acteurs concernés, pour apprendre à se connaître et s’intéresser aux positions de chacun, la seconde partie du projet a pu débuter en 2023 : une collecte de données de grande ampleur et impliquant les pêcheurs.
Collecte de données socio-écologiques
Le premier pilier du projet SHAMA est la donnée. Et pour récolter une donnée de bonne qualité, nous avons décidé de travailler avec toute une variété d’acteurs allant des chercheurs locaux aux pêcheurs. Grâce à une série de missions menées par l’ONG française « Plongeurs du Monde », et des ateliers thématiques, nous avons pu former quatre pêcheurs à la plongée et la récolte de données scientifiques. Avec leur aide, et en se basant sur des données récoltées auparavant par nos soins, nous avons pu ajouter à nos connaissances sur les populations de poissons de la baie. En plus de cela, cette formation nous a offert l’opportunité de partager une partie importante de notre travail scientifique avec des personnes qui en sont souvent exclues. Nous avons ensuite arpenté les cinq villages qui font partie de SHAMA pour récolter des données sur la pêche, l’alimentation des habitants, et en particulier sur la consommation de poisson et le lien avec leur sécurité alimentaire. Enfin, nous sommes allés en mer avec plusieurs pêcheurs pour compter leurs prises, s’intéresser à l’effet d’une aire marine protégée locale, et les liens entre qualité de l’habitat et qualité de la pêche.
Synthèse des données et partage
Les données brutes n’ont souvent de valeur que pour les chercheurs. Après avoir récolté bon nombre d’informations, nous avons ensuite procédé à un rigoureux travail de digestion et de synthèse pour partager ces données avec les personnes qu’elles concernent. Un résultat important que nous avons pu discuter à plusieurs reprises, est l’importance majeure des exports de poissons dans certains villages. Nous avons pu calculer que Batas et Silanga exportent respectivement 89% et 84% de leurs prises annuelles, souvent au détriment des habitants locaux (plus de 1 500 habitants) qui doivent subir une augmentation des prix et une diminution de la disponibilité du poisson sur le marché local. Sur une note plus positive, les données que nous avons récolté sur la pêche ont pu démontrer un effet positif d’une aire marine protégée déclarée il y a quelques années, avec une amélioration des prises dans ses environs. Le travail de récolte de données ayant été mené en collaboration directe avec des pêcheurs, ce résultat est plus facile à communiquer, plus compréhensible pour les usagers des ressources marines. Ce travail de synthèse a ensuite permis l’organisation de campagnes d’informations dans les villages concernés, réunissant plus de 200 personnes concernées par la pêche et le sort de leurs ressources.
Prochaines étapes
D’autres récoltes de données sont à prévoir, en particulier pour s’intéresser aux dynamiques saisonnières de la pêche et de la consommation de poisson. Notre compréhension des problématiques locales est restée encore relativement statique, et mieux comprendre les enjeux sociaux et écologiques de la pêche nécessitera plus de temps et une réplication de notre travail d’enquête. En même temps, nous travaillons à l’organisation d’un atelier participatif réunissant tous les membres de SHAMA avec les autorités locales, afin de discuter nos résultats et proposer des options de gestion basées sur les faits scientifiques que nous avons retirés de notre travail. Ces options pourront être diverses : restrictions sur les engins de pêche utilisés, contrôle des prix du poissons et de l’export, etc. Quoi qu’il en soit, de telles options ne peuvent être sérieusement discutées qu’autour d’une table à laquelle des représentants des pêcheurs seront présents et auront à la fois une force pour l’élaboration des propositions et la prise de décisions.”