EDITO AUTOMNE 2019
“Parler de changement climatique sans l’océan, c’est oublier le cœur-même de la machine climatique.”
Françoise Gaill, CNRS, Vice-Présidente de la Plateforme Océan et Climat
& Membre du Comité Scientifique de Pure Ocean
Ce 25 septembre, à Monaco, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a publié un “Rapport Spécial sur l’Océan et la Cryosphère dans le contexte du changement climatique”.
Nous le savons, l’océan se trouve au coeur de la machine climatique planétaire : Il absorbe plus de 25 % du CO2 émis chaque année par l’Homme et fournit 50 % de l’oxygène. Il absorbe également plus de 90 % de la chaleur résultant des émissions de gaz à effet de serre (GES), limitant de fait le réchauffement de l’air que nous respirons, et jouant ainsi un rôle essentiel dans la régulation du climat.
Ce rapport spécial du GIEC marque une étape cruciale ! Les interactions océan et climat font enfin l’objet d’un état des lieux très détaillé, mettant nettement en évidence et de façon inédite : la biodiversité marine comme une composante majeure du système climatique mondial, les services rendus par les écosystèmes côtiers et marins à l’ensemble de l’humanité, et leur vulnérabilité face aux changements globaux.
Le GIEC alerte ainsi sur l’accélération des changements globaux.
L’océan se réchauffe à un rythme qui s’accélère. À titre d’exemple, entre 2013 et 2015, le Pacifique Nord-Ouest a vu sa température augmenter de plus de 6°C provoquant l’apparition de vagues de chaleur océaniques avec un fort impact sur la biodiversité marine.
Le niveau de la mer augmente plus vite que les précédentes prévisions. Sur la dernière décennie, le niveau marin a augmenté de 3,6 mm/an, la hausse globale pourrait être de 110 cm à la fin du siècle !
L’océan perd de l’oxygène : la consommation d’oxygène dans certaines zones devient supérieure à l’oxygène que produit l’océan. Cette désoxygénation pourrait mener à une perte de 15 % de la biomasse globale des animaux marins d’ici 2100.
Des phénomènes irrémédiables et irréversibles.
Par exemple, si le fait que l’océan absorbe du carbone a conduit à ce que 95 % des eaux de surface se soient davantage acidifiées, l’arrêt des émissions de CO2 ne permettra pas d’inverser le processus.
Par ailleurs, la fonte des glaces et l’augmentation des températures altèrent le fonctionnement des courants marins. Entre autres, le ralentissement du courant Nord Atlantique diminue la productivité marine, provoque des tempêtes hivernales en Europe, et réduit les précipitations au Sahel et en Asie du sud.
Un rapport résolument tourné vers les impacts sur les sociétés humaines
Si la particularité de ce rapport est d’observer les conséquences du changement climatique sur les écosystèmes côtiers et marins, il souligne également le fait que les sociétés humaines seront directement impactées : plus de 3 milliards de personnes dépendent des ressources alimentaires et des protéines que fournit l’océan, et plus d’un quart vit à moins de 100 km des littoraux.